Je vous présente ici le résumé de l'ouvrage de Tertullien "DE MONOGAMIA" (SUR LE MARIAGE UNIQUE) :
Nous reconnaissons les charismes de l’Esprit, et chez nous, une continence fidèle à la vraie religion va de pair avec une licence pleine de discrétion, et toutes les deux demeurent auprès de Dieu : la continence honore la loi du mariage, la licence se modère. La première n’est pas imposée, la seconde est réglée. L’une conserve la liberté, l’autre la mesure.
Nous ne connaissons qu’un seul mariage, comme nous n’avons qu’un seul Dieu. La loi du mariage comporte plus d’honneur, lorsqu’elle conserve aussi la pudeur.
Parcourons les anciennes Écritures, nos références communes. Nous cherchons expressément à démontrer que la discipline de la monogamie, loin d’être nouvelle et étrangère, se révèle au contraire antique et propre aux chrétiens.
Quant à l’antiquité, où trouver modèle plus antique que dans l’origine même du genre humain ? Dieu n’a façonné pour l’homme qu’une seule femme ; Il n’a tiré de lui qu’une seule côte (Genèse 2:21) : et pourtant, bien sûr, Adam en avait plusieurs. De même, en préface à son œuvre, Il déclara : « Il n’est pas bon pour l’homme d’être seul, faisons-lui une aide » (Genèse 2:18) ; Il aurait dit « des aides », s’Il l’avait destiné à avoir plusieurs épouses. Il ajouta aussi une loi pour l’avenir, puisque c’est à titre de prophétie qu’il fut dit : « Et ils seront deux en une seule chair » (Genèse 2:24) – non pas trois, ni plusieurs ; d’ailleurs, ils ne seraient plus deux, s’ils étaient « plus de deux ». La loi est restée : car l’unicité du mariage a persisté jusqu’au bout.
Le second genre humain lui aussi, lors de sa reconstitution, naquit de la monogamie comme d’une mère. Deux êtres en une seule chair recommencent de croître et de se multiplier (cf. Genèse 1:28 et 9:1) : Noé et sa femme, ainsi que leurs fils, en d’uniques noces (cf. Genèse 7:7).
Voilà pour le témoignage des premiers temps, la garantie qu’offrent nos origines, et le jugement préalable que Dieu a donné en instituant Sa loi. A coup sûr, c’est une loi, non un simple conseil ; car si c’est bien ainsi qu’on a agi à l’origine, nous découvrirons que le Christ nous remet au commencement. Par exemple, dans la question du divorce (répudiation), disant que Moïse l’a permis à cause de la dureté du peuple, mais qu’il n’en était pas ainsi au commencement (cf. Matthieu 19:8), Il fait sans aucun doute revenir au commencement l’indissolubilité du mariage. Et ainsi, ceux que Dieu a unis au commencement, les créant deux en une seule chair, l’homme aujourd’hui ne les séparera pas (cf. Matthieu 19:6).
L’Apôtre dit aussi, dans sa lettre aux Éphésiens (1:9-10), que Dieu « s’est proposé, pour le réaliser lorsque les temps seraient accomplis, de récapituler dans le Christ, c’est-à-dire de ramener au commencement en Lui, « toutes les créatures, les célestes comme les terrestres ».
Et justement, dans le Christ tout est rappelé au commencement, de telle façon que la foi est revenue de la circoncision à l’intégrité de la chair, comme au commencement, qu’a été restauré le libre usage des aliments à la seule exception du sang (cf. Genèse 9:3 et Actes 15:29), comme au commencement, qu’ont été rétablies l’indissolubilité du mariage, comme au commencement, et l’interdiction du divorce, qui n’existait pas au commencement, et qu’enfin l’homme dans son intégrité est rappelé au Paradis, où il fut au commencement.
Pourquoi donc le Christ n’y devrait-il pas ramener Adam monogame au moins, si Adam ne peut s’offrir dans la pureté qu’il avait lors de son renvoi ? Pour tout ce qui tient, dès lors, à la restitution du commencement, la logique et du plan divin et de ton espérance exige de toi ce qui fut au commencement, ce qui trouve origine en Adam et nouvelle origine en Noé. Choisis lequel des deux tu prendras pour commencement : dans les deux, la discipline originelle de la monogamie te revendique pour elle.
Mais cherchons encore des gens où nous puisions notre origine (car nos pères monogames Adam et Noé ne plaisent pas à certains). Voici en effet qu’ils en appellent à Abraham. En effet, nous les chrétiens, sommes appelés fils d’Abraham en raison de notre foi, comme l’enseigne l’Apôtre lorsqu’il dit aux Galates (3:6-7) : « Vous savez bien que ceux qui relèvent de la foi, ceux-là sont fils d’Abraham » ; quand donc « Abraham crut en Dieu », quand est-ce que « cela lui fut imputé à justice » ? C’est toujours au temps de sa monogamie.
Mais si, par la suite, il connut deux changements (passant à la bigamie par son concubinage avec une servante, et à la circoncision par le singe de l’alliance), tu ne peux le reconnaître pour ton père qu’au moment exact où il crut en Dieu – puisque tu es son fils selon la foi et non selon la chair.
Ou, si tu suis Abraham dans la période de bigamie, accepte aussi le circoncis ; si tu rejette le circoncis, du coup tu refuseras aussi le bigame. Tu ne pourras mêler les deux projets que Dieu forma sur lui et qui s’opposent sous un double aspect : le couple bigamie-circoncision est sans rapport avec le couple monogamie-incirconcision. Tu acceptes la bigamie ? – admets aussi la circoncision. Tu gardes l’incirconcision ? – tu es tenu à la monogamie.
Or tu es fils (dans la foi) de l’Abraham monogame, comme aussi de l’Abraham incirconcis, à tel point que, si tu te fais circoncire, tu n’es plus son fils désormais ; tu ne relèveras plus de la foi.
Semblablement, si désormais tu te permets la bigamie, tu n’es pas issu de cet Abraham qui crut d’abord, au temps de sa monogamie. De fait, quoique par la suite il soit appelé père de nombreuse nations (cf. Genèse 17:4-5), il ne l’est néanmoins que de celles qui, en raison de leur foi (antérieure à la bigamie) peuvent être comptées au nombre de ses enfants.
Ainsi voilà les gens dont, à mon sens, je tire origine ; j’ignore tous les autres.